Les Montagnes de Hui Kiang Seng

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J’ai rencontré Mademoiselle Seng à l’école des Beaux Arts de Paris et tout de suite je me suis demandé ce qu’elle pouvait bien y faire tant ce qu’elle montrait se distinguait des pénibles exercices des élèves.

Ses œuvres utilisant le sel (puis le sucre) atteignaient une perfection qui liait harmonieusement la forme à la nature des matériaux. Elle aurait pu s’arrêter là et rendre sans fin la mouvance des vagues par la pulvérulence du sel. Nous aurions subi alors  cette fascination que la mer exerce sur ceux qui se laissent capturer par elle, éprouvant ainsi une presque définitive mise hors du temps.

J’ai eu la chance de ne pas perdre Hui Kiang de vue et ses dernières photographies me firent découvrir un nouvel espace dans lequel elle nous introduit subrepticement. Ses montagnes ont une simplicité évidente, elles sont uniques au sens le plus strict, elles sont très visiblement peinture et le ciel très évidemment photographique. Les deux choses si intimement liées que le spectateur n’éprouve aucun sentiment de « collage », mais la plénitude du sujet proposé.

Le processus d’obtention de ces photographies a toutes raisons d’être dévoilé. Loin de nous informer des manipulations inhérentes à tout métier, ce qui serait fastidieux, il prolonge l’espace de l’œuvre, il nous permet d’accéder à une perspective  pluridimensionnelle à laquelle l’art de notre temps ne nous a guère habitués. Nous sommes pris par la main (ce qui à mes yeux est une grande qualité !) pour aller des grands thèmes de la peinture chinoise à une vision qui à mes yeux de spécialiste de rien du tout me fait penser à Brunelleschi (la tavoletta) et Alberti quand ils se penchaient sur la théorie de la perspective.

Non, non Mademoiselle Seng ne copie pas ses ancêtres pas plus qu’elle ne s’inspire du florentin et du génois de la Renaissance dont elle offre un contrepoint, c’est moi qui m’essaye à la critique (d’art !).

Hui Kiang peint sur les vitres de sa fenêtre une montagne et le ciel qui est de l’autre côté du verre devient celui de « sa montagne ». Ensuite elle photographie les deux, c’est simple comme bonjour.

Ah, j’oubliais, après elle efface tout.

Paul Armand Gette

Paris, mai 2009

 

J’ai beaucoup d’audace à me livrer à ce jeu. Je ne sais pas comment Tenebria va prendre mon intrusion dans son domaine. Je prends le risque.

 

 

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