Transect


Le 0m. n’a pas fini de m’ouvrir des espaces infinis. J’ai bien fait de le chiper aux phytosociologues. Quand je l’ai fait en 1974, je ne me doutais pas de l’étendu des plaisirs qu’il allait me procurer.

Le transect, après 37 ans d’attente, est en place dans une étroite vallée des Alpes de Hautes Provence. Il ne transectionne pas uniquement le paysage, mais aussi ce qui m’a toujours passionné, parce que tout à fait entre nous, le paysage, je ne l’ai jamais trouvé très passionnant. Occupé, non pas par le détail, mais par ce qui est près, j’ai plus souvent l’œil dans le voisinage que perdu dans les lointains.

La vallée est  étroite, ce qui dispense le regard de se perdre. Si vous y allez, c’est une fente que vous allez parcourir et mes repères forts discrets quoique bien visibles sont au nombre de 9. C’est un joli chiffre, divisible par 3 ce qui n’est pas pour me déplaire. Remarquez, il n’est pas le fait du hasard, plutôt d’une longue observation, car il ne s’agissait pas de vous flanquer devant ce qui crève les yeux ni de vous faire pousser des exclamations qui auraient dérangé les échos.

Il s’agissait de quoi au fait ? En dehors de rompre l’ennui des jours de vous promener peut-être, de vous montrer ce à côté de quoi vous alliez passer indifférent, l’ignorant sans doute, de vous débarrasser du circuit pittoresque avec en bout de course la boutique à souvenirs, alors que d’aller des « Cheveux de Vénus » aux « Splendeurs de la nuit » ne va pas vous couter beaucoup d’efforts.

Je passe ma vie à ce genre de chose, me distraire le plus sérieusement du monde pour vous rendre une demie journée un peu moins habituelle. La compagnie de Myette et de Nadine fut des plus plaisantes, sans elles j’aurais raté  le fond de la rivière oligocène ou le contact un peu brutal entre deux époques, oh pardon deux ères !

Je n’ai jamais aimé l’image de l’artiste solitaire, J’ai toujours préféré une présence, alors que je déteste la communauté. Juliette à Marseille et Emma à Digne, ont bien voulu m’accompagner un instant, car c’est bien de cela qu’il s’agit de cet accompagnement, lors des promenades et aussi dans ma pratique, qui m’a poussé à reconsidérer l’usage que j’ai longtemps fait du mot modèle.

J’avoue mon incapacité à nommer ce que je considère comme le plus important dans cette pratique de l’art qui efface toute les contraintes inventées pour nous discipliner. A la regarder de plus près, il n’y a rien là d’extraordinaire, se devrait être notre quotidien que cet abandon du pouvoir qui gangrène toutes les relations entre les êtres.

Où suis-je, sinon  aujourd’hui dans un temps qui me convient même si je n’en apprécie guère ceux qui s’arrogent le pouvoir pour exister enfin à leurs yeux, infâmes certes, misérables dans l’insignifiance, méprisables mannequins arrogants et ridicules dans leur comportement, en place bien évidemment, il ne saurait en être autrement.

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